Les jardins royaux : des écrins de verdure gérés écologiquement
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Vous avez certainement déjà visité un des jardins royaux à Bruxelles. Ces 9 parcs publics, répartis autour du domaine royal de Laeken, offrent aux Bruxellois et Bruxelloises une belle dose de nature, d’une infinie variété. Dans ce nouveau podcast, découvrez comment aujourd’hui ces écrins de verdure sont gérés et préservés de façon écologique.
Nous nous sommes entretenus avec nos collègues Martin et Tülin, qui s’occupent respectivement du maillage bleuLe Maillage bleu est un programme mis en œuvre depuis 1999, qui vise plusieurs objectifs : séparer les eaux usées des eaux propres afin de limiter l'apport d'eau aux stations d'épuration, restaurer certains éléments du réseau hydrographique de la Région, réaménager des tronçons de rivières, des étangs et des zones humides pour leur rendre toute leur valeur biologique, et leur faire éventuellement bénéficier de mesures spéciales de protection, et assurer la fonction paysagère et récréative de ces sites., la gestion de l'ensemble des cours d'eau et des étangs à Bruxelles, et de la gestion des espaces verts. Tous deux ont participé à des aménagements et des travaux de rénovation dans le parc Sobieski, le Jardin du fleuriste ou encore les Serres du Stuyvenberg. Ils sont heureux de vous raconter l'histoire de ces parcs royaux, et la façon dont ils répondent aux défis présents et futurs. Nous vous invitons à écouter leur témoignage sur ces parcs qu’ils connaissent bien, et de quelle manière Bruxelles Environnement s’occupe aujourd’hui de ces magnifiques espaces verts.
Vous êtes-vous déjà promené dans le Jardin colonial, le parc Sobieski, le jardin du Pavillon chinois ou encore le parc de Laeken, pour y admirer une nature et une architecture très diversifiées ? Mais peut-être recherchez-vous simplement le calme et la tranquillité pour vous ressourcer ? Après ce podcast, vous regarderez les jardins royaux, véritables oasis de verdure au cœur de Bruxelles, d’un tout autre œil.
Retrouvez plus d’informations sur les jardins royaux et d’autres espaces verts à Bruxelles sur gardens.brussels
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[Titre] Les jardins royaux : des écrins de verdure gérés écologiquement
[Modératrice Judith Verbist, introduction]
« Bonjour et bienvenue dans ce nouveau podcast de Bruxelles Environnement. Saviez-vous que les jardins royaux sont un ensemble de pas moins de 9 parcs achetés par le roi Léopold II ? Il voulait en faire un grand jardin autour de sa résidence. Et saviez-vous que près de 1.000 m2 des serres du Stuyvenberg ont été récemment restaurées ? Aujourd'hui, nous nous entretenons avec nos collègues Tülin et Martin. Ils nous en diront un peu plus sur la récente rénovation du parc Sobieski et des parcs royaux dont il fait partie.
Je me présente, je suis Judith Verbist, porte-parole de Bruxelles Environnement et aujourd'hui avec moi, il y a Tülin et Martin. Merci d'être présents aujourd'hui. Tout d'abord, est-ce que vous pourriez vous présenter en quelques mots et nous donner des exemples de projets sur lesquels vous travaillez à Bruxelles Environnement ? Tülin ? »
[Tülin]
« Oui bonjour, je suis responsable d'un des départements de la division espace verts et nous traitons essentiellement de gestion et entretien, et donc je travaille avec des collaborateurs pour tout l'ouest de Bruxelles. »
[Modératrice]
« Et quel genre de collaborateurs ? »
[Tülin]
« Des paysagistes, des contrôleurs de travaux, des jardiniers. »
[Modératrice]
« Merci. Et Martin ? »
[Martin]
« Bonjour, donc moi je suis responsable du maillage bleu. Le maillage bleu, c'est l'ensemble des cours d'eau et des étangs au niveau de Bruxelles. Je fais partie du département eau et on s'occupe à la fois des chantiers extraordinaires, donc des remises à ciel ouvert de la Senne ou de la Woluwe, également l'installation d'un étang de baignade à Neerpede, ainsi que l'entretien ordinaire des cours d'eau et des étangs à Bruxelles. »
[Modératrice]
« Merci pour cette présentation. Et comme je l'ai dit précédemment dans ce podcast, nous allons aujourd'hui parler des parcs royaux de Bruxelles. Tout d'abord, le parc Sobieski a récemment été rénové. Ce n'est qu'un des nombreux parcs royaux. Combien de parcs y a-t-il au total et quelle est leur histoire, Tülin ? »
[Tülin]
« Ouh là là ! Il y en a des choses à dire. Alors, en fait, on a énormément de petits parcs qui sont situés autour du domaine royal et qu'on appelle donc les parcs royaux. Je vais les énumérer dans l'ordre, même si je vais en parler un peu plus de manière anecdotique après. On a le Jardin colonial, le parc Sobieski, les Jardins du fleuriste, le square du 21 juillet, le parc du Pavillon chinois, le jardin de la Tour japonaise. Et donc ça ce sont tous des parcs qui sont situés autour du domaine royal et qui ceinturent le domaine royal. »
[Modératrice]
« Et est-ce que tu as un peu plus d'infos au niveau de l'histoire ? Quand est-ce que ces parcs ont apparu à Bruxelles ? »
[Tülin]
« Alors fin du 19e, début du 20e siècle, en fait, il faut savoir que Léopold II, qui habitait dans le château de Laeken, a acquis au fur et à mesure des propriétés qui étaient adjacentes. On appelait ça des campagnes. Et donc, il achetait petit à petit toutes ces propriétés autour pour agrandir son parc, son jardin d'agrément. D'ailleurs, quand on parle du parc Sobieski, on pouvait dire à l'époque que c'était le verger royal de Léopold II. Quand on parlait du Jardin colonial, c'était son jardin colonial. Quand on parlait des serres du Stuyvenberg, il y avait énormément de plantes potagères et de plantes annuelles et bisannuelles qui étaient cultivées à cet endroit-là. Mais en fait dans les serres, ce qui était assez innovateur, on va dire, pour l'époque, c'est qu'on cultivait des orangers, des pêchers, des abricotiers, des citronniers, des choses qu'on n'avait pas en fait l'habitude de voir en Belgique, mais plutôt dans les pays méditerranéens. »
[Modératrice]
« Et les Jardins du fleuriste, est-ce que là-bas il y avait des plantations spécifiques ? »
[Tülin]
« Alors les Jardins du fleuriste, c'était le fleuriste de Léopold II. Et donc, c'était essentiellement un endroit où les jardiniers cultivaient des fleurs ornementales qui étaient destinées à embellir les jardins de toute la royauté. Et donc, c'est là qu'on cultivait notamment des plantes qui pouvaient aller dans le château de Laeken ou bien au château de Ciergnon ou ailleurs dans les propriétés adjacentes comme le domaine du Belvédère. Ou la Ferme Rose, où Fabiola a habité pendant très longtemps. Il avait dédié tous ces parcs qui sont autour du domaine royal à des fonctions bien spécifiques. »
[Modératrice]
« Y a-t-il d'autres parcs qui avaient des fonctions intéressantes à l'époque ? »
[Tülin]
« C'est-à-dire que le domaine royal en lui-même et le parc de Laeken qui étaient des parcs plutôt paysagers étaient des parcs où il aimait se promener, qui étaient moins des jardins d'agrément mais plus des parcs où on allait se balader. Quand on a tous ces petits parcs en fait, qui sont plus des jardins d'agrément, on peut par exemple dire qu'ils cultivaient des poires et des pommes avec une diversité incroyable, c'était pour impressionner les invités que le roi accueillait chez lui.
Une anecdote qui m'avait frappée à l'époque lors des dîners de gala, quand il recevait le monde international au château de Laeken… Eh bien, il faisait amener par ses jardiniers directement les pots, où étaient les citronniers et les orangers, et les déposaient sur la table. Et donc les convives n'avaient plus que le loisir de les cueillir directement sur l'arbre. C'est quand même assez incroyable parce que ce ne sont pas des fruits qui arrivent sur une assiette. »
[Modératrice]
« Super intéressant. Et si je ne me trompe pas, en 1975, les jardins royaux ont été donnés par la Fondation royale au service du Plan vert… »
[Tülin]
« Oui, ça s'est fait en plusieurs étapes. Il faut savoir que dans le parc Sobieski et dans le Jardin colonial, il y avait encore d’anciennes serres. Si on parle du parc Sobieski, c'était son parc fruitier, donc il y avait des arbres fruitiers un petit peu partout. Ce n’était pas vraiment des endroits qui pouvaient être ouverts au public directement. Il y a donc eu des réaménagements au fur et à mesure. Le Plan vert c'était l'organisme qui s'occupait des espaces verts pour le fédéral. Eh bien, ils ont d'abord effectué des travaux d'aménagement pour pouvoir accueillir le public et donc la Donation royale a donné ces espaces-là pour en faire justement des parcs publics. »
[Modératrice]
« Et est-ce que ces parcs sont tous classés ? »
[Tülin]
« Oui, c'est-à-dire qu'ils sont tous classés sauf les Jardins du fleuriste. On a restitué une partie des jardins d'origine, c'est-à-dire qu'on a restitué l'esprit et une partie des tracés. Donc, je me rappelle, en 1998, quand on m'a donné cette partie de Bruxelles à gérer… On a même été subsidiés par le Fonds de gaz naturel à l'époque. Et donc, c'est moi qui ai initié le projet des Jardins du fleuriste au départ. On voulait en faire un exemple de parc. On voulait même y créer un centre pour les arts et techniques du jardin.
Et donc c'était pour vraiment faire connaître aux gens qui ont un jardin à Bruxelles, ce qu’ils pouvaient planter dans leur jardin, des choses qu'on ne pouvait pas voir couramment. On était dans cet esprit-là. À ce moment-là, on ne parlait pas encore de réchauffement climatique, ou ce n’était pas encore vraiment à l'ordre du jour, mais on parlait d'essences un petit peu plus diversifiées. On parlait déjà de plantes indigènes, plus indigènes, et des choses comme ça. Donc ça, c'était dans la fin des années 90. On y réfléchissait déjà, en fait. »
[Modératrice]
« Intéressant. Martin, est-ce qu'au niveau de l'eau, il y a quelque chose à dire quand on parle de ces parcs royaux ? »
[Martin]
« Tout d'abord, lorsqu'on fait des projets d'aménagement autour du maillage bleu, on se pose toujours des questions, savoir comment l'eau peut être intégrée dans le parc. Il y a pas mal de fonctions que l'eau apporte. Tout d'abord, sans eau, il n'y a pas de vie. Donc ce sont des parcs qui sont souvent très riches. Mais il y a également le côté paysager. C'est toujours agréable de se promener autour d'un cours d'eau ou d'un étang. Il y a les aspects de lutte contre les inondations, donc comment pouvoir gérer des eaux au niveau du parc et des cours d'eau, des étangs.
Il y a également tout l'aspect de la qualité. Si on a des cours d'eau, des étangs, qui sont naturels avec des plantes, il va y avoir un rôle de phytoépuration. On va avoir une eau qui est riche, de bonne qualité, riche en oxygène. Et on va avoir toutes des espèces animales et végétales qui vont s'y développer.
Tous ces éléments-là font un peu partie de notre boîte à outils pour développer un projet. Et donc, dans le projet de la rénovation des espaces bleus autour du parc Sobieski, on s'est posé toutes ces questions. Par exemple, on avait un étang qui était assez bétonné, parce qu'à l'époque, on aimait bien vraiment que la limite entre la terre ferme et l'eau soit bien définie. Donc on mettait des berges bétonnées. Mais là, on a essayé, en tout cas en partie, de renaturer ces berges avec des pentes douces pour pouvoir justement avoir ce gradient d'humidité entre la terre ferme et le milieu aquatique.
[Modératrice]
« Et est-ce qu'il y a des points d'eau ou des cours d'eau dans tous les parcs ? »
[Martin]
« Pas dans tous les parcs, mais quand même dans la majorité. C'est une raison très simple. C'était des zones qui étaient susceptibles d'être inondées. Et donc, c'est des endroits où on n'a pas construit, heureusement. Ce sont des zones qui sont restées espaces verts pour justement, que ces espaces verts puissent jouer leur rôle tampon et éviter d'avoir des inondations partout dans la ville. »
[Modératrice]
« Leur rôle tampon... Est-ce que tu peux expliquer ce terme, Martin ? (rires) »
[Martin]
« En gros, à partir du moment où il y a des eaux de ruissellement, des eaux de pluie, des risques d'inondation, on va avoir le niveau d'eau qui monte. L'eau doit toujours s'écouler quelque part. Soit elle s'écoule, elle stagne dans des zones vertes, dans les parcs, soit elle va inonder les rues ou les caves. C'est toujours intéressant d'avoir ces zones qui sont susceptibles d'être inondées, qui peuvent, dans des moments exceptionnels, être sous eau. C'est tout à fait acceptable d'avoir à certains moments des pelouses ou même des chemins dans des parcs qui sont sous eau. Et ça va permettre de préserver, d'éviter des inondations en aval de ces parcs. »
[Modératrice]
« Donc si je le comprends bien, ces parcs jouent un rôle important, un rôle de tampon à Bruxelles. »
[Martin et Tülin]
« Tout à fait. Oui ! »
[Modératrice]
« Très bien. Et j'ai une autre question pour vous. Tülin, comment ces parcs sont-ils gérés ? Parce qu'il y a beaucoup de parcs, comment est-ce qu'on gère tous ces espaces verts ? »
[Tülin]
« Eh bien, on les gère de manière de plus en plus écologique, on va dire. Moi-même, étant architecte paysagiste, on a la vision évidemment de parcs très bien léchés, très horticoles. On a appris nos études comme ça, c'était des parcs dessinés, très architecturés, eh bien, il y a moyen de concilier les deux. »
[Modératrice]
« Et comment fait-on ça dans ces parcs royaux ? »
[Tülin]
« Alors ça c'est tout l'art en fait du paysagiste. Déjà ce sont des parcs qui sont, à la base, déjà déterminés. C'est-à-dire que ce n'est pas un nouvel aménagement. Ce ne sont pas des parcs que l'on dessine de toutes pièces. Ce sont des parcs qui sont existants. Et donc, on a déjà toute une base qui est là. On a déjà toute une végétation qui est présente. On a déjà toute une flore qui est présente. Et on travaille à partir de ces éléments-là.
Et dans la rénovation et dans la gestion des parcs pour les rendre de manière la plus écologique possible, on va simplement changer, par exemple, les matériaux qui sont utilisés sur des chemins. On va, par exemple, changer la façon dont on va gérer les pelouses. Donc au lieu de les tondre, je vais dire 25 à 30 fois par an, dans certaines parties de parc, on va pouvoir les faucher. C'est-à-dire on va pouvoir laisser des produits de fauche et on va pouvoir gérer d'une autre manière tout en accueillant le public, c'est-à-dire qu'on va pouvoir faire venir le public sur des parties où ils ont l'habitude de venir pour se récréer. Et donc les autres parties, on va pouvoir les laisser plus « sauvages ».
[Modératrice]
« Et tout ça c'est bien pour l'écologie ? »
[Tülin]
« Voilà. Et donc ça veut dire quoi ? Il y a deux aspects fondamentaux. Pourquoi c'est bon pour l'écologie ? D'une part, il y a énormément d'insectes qui peuvent revenir dans ces parties-là. Et d'autre part, ça limite le réchauffement climatique, parce qu'il faut savoir qu’une zone tondue peut représenter une hausse de température par rapport à une zone non tondue. Ça peut varier entre 10 et 15°. C'est-à-dire que si vous allez sur un sol qui est tondu, en plein été, et qu'il fait par exemple 30°, vous allez avoir 30° à l'endroit où il y a la zone tondue. Et si vous avez une prairie de fauche, donc avec une herbe qui est non tondue, vous allez pouvoir avoir des différences de température qui vont jusqu'à 15° de différence. Et donc ça veut dire quoi ? Ça veut dire que c'est très bon pour le sol, parce que malheureusement, pour l'instant, on ne regarde pas trop ce qui se passe en dessous, mais nos sols sont très importants également. »
[Modératrice]
« Donc, c'est aussi un conseil à donner aux gens qui nous écoutent à la maison, par exemple, ou dans leur voiture ou sous la douche, bien sûr (rires). Et au niveau des pesticides, est-ce qu'on utilise des pesticides chez Bruxelles Environnement ? »
[Tülin]
« Non, pas du tout. Et on ne les utilise plus depuis 1993. Oui, c'est très loin. »
[Modératrice]
« Donc nos parcs sont tous gérés sans pesticides. »
[Tülin]
« Exactement. Sans pesticides, sans insecticides, sans produits phytos. Et on en est très fiers parce qu'on s'est adaptés et on a été un des précurseurs en Région bruxelloise. »
[Modératrice]
« Donc cette gestion écologique, pour résumer, dans les parcs, des exemples concrets sont l'abandon des pesticides. On a aussi parlé de ne pas faucher les prairies trop souvent, parce que ça a un impact sur la température des parcs. Est-ce qu'il y a encore d'autres exemples qui font partie de cette gestion écologique ? »
[Martin]
« La manière dont on gère les eaux de pluie dans les parcs, on essaie maintenant, quand on rénove les parcs, de remettre les eaux de ruissellement vers les espaces verts. Ça permet plusieurs choses. Tout d'abord, ça nous permet de réduire la pression sur le réseau d'égouttage. Et donc, les réseaux d'égouttage, lorsqu'il y a trop d'eau de pluie, trop d'eau de ruissellement, ils débordent et ils débordent vers les cours d'eau. Donc, si on arrive à supprimer un maximum les eaux de ruissellement et les déconnecter des égouts, on va améliorer la qualité des cours d'eau in fine. Ensuite, le fait de ramener les eaux dans les espaces verts, ça va permettre d'alimenter en eau les sols et ça va permettre également de recharger les nappes phréatiques. Et donc avoir des nappes phréatiques, donc l'eau souterraine… qui sont rechargées, ça va également permettre d'avoir un débit plus constant dans les cours d'eau.
Savoir que lorsqu'il pleut, les cours d'eau n'ont pas besoin d'eau. On a des cours d'eau qui débordent presque. Ce n'est pas pendant les périodes de pluie qu'on a besoin que les cours d'eau soient alimentés. Par contre, si on infiltre l'eau dans les eaux souterraines, on va avoir un relargage progressif des eaux vers les cours d'eau. On va réduire, si vous voulez, les périodes de sécheresse. On aura des niveaux d'eau plus constants. »
[Modératrice]
« La nappe phréatique, est-ce que tu pourrais nous expliquer un peu plus ce terme technique ? »
[Martin]
« La nappe phréatique, c'est l'eau souterraine. Et donc quand l'eau de pluie tombe et s'infiltre dans le sol, elle va occuper l'espace vide entre les grains. Et donc c'est très rare, en tout cas ça n'existe pas à Bruxelles, on n'a pas des cavernes avec de l'eau souterraine. Mais il faut savoir que le sable, entre chaque petit grain de sable, il y a du vide, et ce vide est occupé par l'eau lorsque l'eau est présente.
Et donc, la géologie, au niveau de Bruxelles, on va avoir des couches de sable et des couches d'argile, et l'eau va s'infiltrer dans le sable, et tant qu'elle rencontre du sable, elle descend verticalement, et puis elle va se retrouver avec une couche d'argile imperméable, et elle va s'asseoir au-dessus de la couche d'argile. »
[Modératrice]
« Intéressant, j'ai compris maintenant ce que ça veut dire, nappe phréatique. Continuons ce podcast. Mais pour quelles raisons le parc Sobieski a-t-il été rénové ? Y avait-il des problèmes avec le parc ? Parce que voilà, j'ai entendu qu'il a été rénové, qu'il est ouvert au public maintenant. Mais pourquoi est-ce qu'il a été rénové et est-ce qu'il avait des problèmes, Tülin ? »
[Tülin]
« Comme j'ai parlé là tout de suite des matériaux, il était temps qu'on change en fait les matériaux en tout cas, au niveau des chemins. Et comme l'infrastructure était vieillissante… L'opération s'est faite en même temps que la rénovation de l'étang. On voulait faire d'une pierre deux coups. Donc ça ne servait à rien d'aller rénover l'étang, si on ne rénovait pas les chemins en même temps. Pour pouvoir justement amener ces eaux de manière convenable vers un réseau. Il y avait également tout un système de rigoles qui étaient vieillissantes et qu'il fallait qu'on change. »
[Modératrice]
« Oui, donc j'entends qu'il y avait vraiment un problème de sécurité, peut-être même que l'infrastructure était vieillissante et que c'était un possible danger pour le public. »
[Tülin]
« Oui, c'est-à-dire que sécurité, c'est un grand mot. Mais en tout cas, il faut savoir que le parc est fort en pente. Il s'agissait ici de vraiment rénover les chemins pour que tout un chacun puisse se permettre de venir se balader dans le parc. »
[Martin]
« Dans la réflexion de l'aménagement du parc Sobieski dans son ensemble, il y a eu un gros travail historique, parce que c'est un parc classé, et donc on a travaillé avec les monuments et sites d'Urban pour réfléchir aux plans d'origine, à l'architecte paysagiste qui avait conçu ce parc. On a retrouvé les anciens plans et on a réfléchi à pouvoir restaurer les cheminements de la manière la plus authentique possible. Ce qui a permis plusieurs choses, tout d'abord de réduire la surface des chemins, parce que dans les années 70, on avait peut-être donné trop de place aux chemins et également de pouvoir justement retravailler sur le système d'évacuation des eaux, pour pouvoir ramener toutes ces eaux de ruissellement vers le verger, vers les pelouses, pour avoir une gestion intégrée des eaux de pluie sur l'ensemble du parc. »
[Modératrice]
« Donc les eaux de pluie ont quand même joué un grand rôle dans cette rénovation, si je le comprends bien, Martin. »
[Martin]
« Tout à fait. Et une des raisons pour laquelle c'était important, c'est que, malheureusement, l'étang du parc Sobieski, donc l'étang Sobieski est connecté à un autre étang, donc ça passe en dessous de l'avenue Sobieski, ça arrive à l'étang Clémentine, qui est un étang qui est géré par la ville de Bruxelles. Malheureusement, au-delà de cet étang, les eaux sont renvoyées vers l’égout. Donc c'était très important de réduire au maximum les eaux de ruissellement qui allaient directement vers l'étang.
Parce que ça permettait justement de réduire les inondations, réduire la pression sur les égouts, et donc, in fine, améliorer la qualité de la Senne, par exemple. »
[Modératrice]
« Et on pourrait dire que c'était un challenge d'effectuer ces travaux-là ? »
[Martin]
« Un challenge, non. On a dû être attentifs. La gestion intégrée des eaux de pluie, c'est un mot qui, parfois, peut faire peur, mais c'est souvent des choses qui sont assez simples.
On a de l'eau, ça ne sert à rien d'aller faire des tuyaux sur des kilomètres et des kilomètres pour l'amener vers le réseau hydrographique, alors qu'il y a une pelouse, alors qu'il y a une zone qui pourrait bénéficier de cette eau. Donc ce sont des gestes très simples et qui doivent être réintégrés dans toute la gestion de nos parcs et de l'espace public en général. »
[Modératrice]
« Et en parlant de challenge, est-ce qu'il y avait d'autres grands challenges dans les rénovations des serres, par exemple, Tülin ? »
[Tülin]
« Il fallait de toute façon, conserver l'histoire des lieux. On ne pouvait pas évidemment le refaire à l'identique comme ça s'est passé au niveau des Jardins du fleuriste parce que ça aurait coûté beaucoup trop cher. Maintenant on n’injecte plus autant d'argent qu’on en a injecté au début du 20e siècle. On n'a plus la folie des grandeurs. On va justement essayer d'allier le patrimoine et en même temps la qualité de ce qu'on peut amener, y voir et essayer d'avoir un maximum de techniques qui permettent de faire des économies.
Donc il faut savoir qu'au départ, pour les gens qui ne connaissent pas, il y avait ce qu’on appelle un peigne, un peigne de 18 serres, avec une galerie centrale. On n'a pas restitué les 18 serres de départ. C'est-à-dire qu'on a pris les serres qui allaient pouvoir servir, qui étaient encore en assez bon état, qui étaient les grandes serres, on les a rénovées à fond.
Là on a vraiment essayé de restituer exactement ce qu'il y avait au départ. Mais nous avons utilisé d'autres matériaux pour d'autres serres. Et donc on a, je vais dire, ce n'est pas une restitution, mais c'est une façon de se remémorer, c'est de garder la mémoire des lieux tout en étant plus moderne aujourd'hui et il y a normalement une concession qui va être faite dans cet endroit pour de la culture potagère. »
[Modératrice]
« Donc ici on a utilisé des techniques anciennes et aussi des techniques modernes, si je comprends bien. On a déjà parlé de l'eau de pluie mais comment est-elle gérée vraiment et quel rôle cette gestion joue-t-elle dans la préservation des jardins royaux, Martin ? »
[Martin]
« L'avantage des serres et des chemins autour de ces serres, c'est que ce sont des zones qui sont imperméables et donc on peut récolter les eaux de pluie. C'est très intéressant, surtout s'il y a une activité de maraîchage qui se fait dans ces serres, de pouvoir utiliser un maximum ces eaux de pluie. Il y a eu, dans le cadre de la rénovation, une restauration et même une augmentation du volume des citernes souterraines. Donc, toute l'eau qui ruisselle, sur les pans, sur les toits de ces serres, est acheminée vers des citernes qui vont après pouvoir être réutilisées pour l'arrosage, à la fois des cultures maraîchères, mais également pour le parc. »
[Tülin]
« Pour les Jardins du fleuriste, il y a une citerne aussi. Donc toutes les eaux de ruissellement qui sont au niveau des chemins arrivent dans une citerne qui a une capacité de presque 500 m3. »
[Martin]
« Pour la petite anecdote, corrige-moi si je me trompe, les serres ont été chauffées au mazout ? »
[Tülin]
« Au bois. »
[Martin]
« Au bois, pardon. Il y avait des caves avec des chaudières pour chauffer ces serres, pour pouvoir cultiver des orangers. Et donc, nous, dans le cadre de la rénovation, on a transformé ces volumes souterrains en citernes d'eau de pluie pour pouvoir justement augmenter leur capacité. »
[Tülin]
« Il y avait déjà des citernes. Donc, l'architecte de départ, Henri Maquet, qui a conçu les serres, avait déjà prévu des citernes souterraines. Il en avait prévu deux. Mais ici, vous avez augmenté la capacité. »
[Martin]
« C'est ça. Et donc, maintenant, on a 800 m3 d'eau de pluie qui peut être utilisée. »
[Modératrice]
« Incroyable. Mais en parlant de tous ces travaux, j'ai l'impression qu'il y a quand même eu un beau budget qui a été investi là-dedans. Et combien de temps cela a-t-il duré, Martin ? »
[Martin]
« Le chantier était assez important parce qu'il y avait plusieurs phases. Il y avait la restauration des serres, il y avait la renaturation de l'étang, l'aménagement ou l'amélioration de l'ensemble du cheminement du parc Sobieski. On a également remis à ciel ouvert un cours d'eau, on n'en a pas encore parlé. Et donc, en tout ça a duré 29 mois, mais par phase évidemment. Donc ce n'était pas l'ensemble du parc qui était inaccessible au public pendant ces mois. Ça a coûté, dans l'ensemble, environ 5 millions d'euros. »
[Modératrice]
« Est-ce qu'il y a des activités qu'on peut retrouver dans ce parc Sobieski, Tülin ? »
[Tülin]
« Oui. Écoutez, déjà la contemplation, c'est déjà une belle activité, je trouve, surtout à l'heure actuelle.
Il y a énormément de gens aussi qui viennent, que ce soit le Sobieski ou les Jardins du fleuriste qui est relié, c'est un parc qui est juste à côté. Les gens viennent y faire des photos de leur union, de leur mariage, leur célébration. D'ailleurs, on a des fois eu beaucoup de soucis avec ça, parce que les gens rentraient avec leur voiture. Et ça, c'est interdit, évidemment. Les Jardins du fleuriste, c'est un jardin où on travaille depuis presque 20 ans maintenant, on rénove et on améliore et on amène énormément de plantes nouvelles, d'arbres et d’arbustes. Et donc, il y a un côté pédagogie sur lequel on est très attachés, pour que les gens puissent venir voir et s'inspirer. Et évidemment, il y aura la partie, je vais dire, maraîchage local, vente locale, quand les candidatures auront été sélectionnées.
[Modératrice]
« Les candidatures pour quoi spécifiquement ? »
[Tülin]
Pour justement la partie des serres, on veut faire du maraîchage local. Et donc on est occupé à faire un appel d'offres. Quand tout ça sera clôturé, les gens vont pouvoir manger, peut-être, des tomates ou des courgettes ou des potirons qui viennent d'à côté de chez eux. »
[Modératrice]
« Hmm, j’ai bien envie de goûter tout ça ! Alors si j'ai bien compris, en parlant de ces parcs royaux, j'ai l'impression que nos parcs sont vivants. Est-ce correct, Martin ? Est-ce qu'il y a aussi des animaux qu'on peut croiser dans les parcs ? »
[Martin]
« Tout à fait, les parcs font partie d'un maillage bleu et vert, et donc ce sont des couloirs écologiques, et il y a beaucoup d'animaux qui se promènent entre ces parcs. On voit les renards, il y a la buse également qui est souvent perchée au niveau du parc Sobieski. Dans les étangs, on voit des cormorans, le héron cendré, le martin pêcheur est de plus en plus présent. On voit également dans l'étang Sobieski des batraciens. Dès qu'on a terminé les travaux d'aménagement de l'étang, on a vu des œufs de crapauds et de grenouilles. Donc la vie revient directement dès que les travaux sont terminés, c'est assez impressionnant. »
[Modératrice]
« Ça me donne envie d'aller visiter ces parcs. Et pour finir ce podcast, est-ce que vous avez encore un grand souhait. Quel est votre plus grand souhait pour le futur des parcs royaux ? Tülin ? »
[Tülin]
« Mais pas que pour les parcs royaux ! Un de mes souhaits, évidemment, c'est que les gens mettent leurs déchets dans les poubelles appropriées. Nous avons de plus en plus maintenant de poubelles de tri dans nos parcs. Donc, je vous invite vraiment à mettre vos déchets dans les poubelles. C'est très important.
N'oubliez pas qu'il y a des jardiniers, des gardiens qui sont derrière et qui doivent ramasser tous les jours les déchets. N'oubliez pas, dans toute l'actualité que vous entendez, les déchets plastiques, etc. Ça se retrouve dans nos sols, ça se retrouve partout dans nos parcs. »
[Modératrice]
« Donc, petits gestes, mais grand impact. Et Martin, est-ce que toi, tu as encore un grand souhait pour ces parcs ? »
[Martin]
« Oui, peut-être d'arrêter de nourrir les canards et les oiseaux, parce que tout d'abord c'est mauvais pour eux, ça les rend malades. Et puis on va avoir trop de pain dans les eaux des étangs, ce qui va favoriser l'eutrophisation, donc le captage en oxygène dans les eaux, donc on va avoir des lentilles d'eau et on va avoir des eaux stagnantes. Donc, c'est vraiment quelque chose qui a énormément de conséquences par rapport à la gestion du maillage bleu. »
[Modératrice, conclusion]
« Voilà, nous sommes déjà arrivés à la fin de ce podcast. Merci d'avoir pris le temps d'écouter cette émission de Bruxelles Environnement sur les parcs royaux et la rénovation du parc Sobieski. N'hésitez pas à consulter notre site gardens.brussels si vous désirez en savoir plus sur les parcs et les forêts de Bruxelles. Vous pouvez également vous inscrire à notre newsletter mensuelle pour rester au courant des actualités environnementales à Bruxelles et de nos futurs podcasts.
C'était Judith Verbist, porte-parole de Bruxelles Environnement. À bientôt ! »